Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
13 janvier 2007 6 13 /01 /janvier /2007 15:03


   


Pour écouter la chanson cliquez (1 ou 2 fois) sur la première flèche  

   
Comment réussir à trier tous ces papiers les yeux brûlés par les larmes ? Pourtant il le faut. Encore une fois cela m'incombe, pour la même éternelle raison : ma sœur est loin. Venir à l'enterrement de notre mère a déjà représenté un long trajet pour elle. C'est à moi aujourd'hui de vider la maison, de mettre le nez dans toutes ces vieilles photos, ces lettres…

Maman… tu es partie trop vite. Tu ne nous as pas laissé le temps de nous réconcilier… Je suis si désemparée, comment peut-il exister une douleur aussi intense ?

On se quitte dans l'incompréhension… N'y a-t-il donc aucun moyen, jamais, de réparer les erreurs ? Etait-ce écrit ? Quelle leçon, quel apprentissage tirer de tout cela ? Pourquoi mon lot aura-il été, jusqu'au bout, la solitude ? Encore et toujours la solitude. Cette solitude que je n'exprime même plus par la musique, comme s'il n'y avait plus accès pour moi à la moindre consolation…

Il n'y a plus de consolation. Ma mère est morte. Il n'y aura plus d'ultime recours. Il n'y aura plus cette dernière personne qui toujours, nous accueille, nous recueille, inconditionnellement. Non. Je suis seule maintenant. Seule pour de bon. Seule au monde.

 

 

Une lettre encore cachetée...? Quoi ? Elle vient d'Italie ? Mon dieu, est-ce possible ? Serait-ce…

Elle est écrite en français – mon père parlait parfaitement français !– voyons, qui signe ?… Roberto Consuelo ! Cet ami, proche de mon père, dont ma mère m'a tant parlé !

Il dit que… Il parle de mon père : Gino ! Mon dieu, ma mère ne m'avait donc pas menti, mon père s'appelle bien Gino ! Il dit que mon père est… mort.

Je l'ai toujours su. J'ai toujours pensé qu'il n'était plus de ce monde depuis longtemps. Quelle date ?.... 1974…

Comment ? Un héritage ? Mon père me laisserait un héritage ? A moi ? Moi qu'il n'a jamais connue ? Dont il ne connaissait même pas l'existence....

"Au cas où vous auriez mené à terme votre grossesse, puisqu'il serait donc le père de votre enfant, mon frère Gino m'a fait rédiger sur son lit de mort ce dernier souhait : laisser à son enfant...

une maison…"

Une maison, pour moi ?

"...une maison quie se trouve... "

En Calabre ? Là, où mes vaines recherches m'ont déjà conduite, suivant la trace des "Consuelo", émigrés espagnols… Et lui, mon père, qui est-il ? Ma mère n'a jamais su son nom de famille. Est-il lui aussi un Consuelo ? ... Oui ! C'est écrit ! En bas de la lettre, la signature, l'écriture de mon père ! Tremblante, vacillante...

C'est son frère ! J'en étais sûre ! Mais maman, pourquoi n'as-tu jamais ouvert cette lettre ?


Me voici à Cozensa, haut lieu de la Calabre. Un beau jeune homme est venu me chercher à l'aéroport, petit neveu de mon père. Il ne parle pas français. Le trajet en voiture est silencieux, il me passe mouchoir sur mouchoir. Je ne crois pas que je cesserai un jour de pleurer…

Le paysage est si beau, si… Ces montagnes, d'un vert intense… Mes rêves les plus fous, les plus intimes… couleurs, formes, odeurs, bruits… plus exactement : silence, soleil, lumière….

Nous descendons. Le moteur s'arrête. Mon cœur aussi. C'est elle. C'est dans les pierres de cette bâtisse que mon père est né. Odeur des murs… papa, papa...

Je m'effondre. Il n'y pas de mots. Il n'y a plus qu'un corps. Qui se tord. Je crie. J'accouche de moi-même tandis que mon neveu pose sa main sur mon épaule. Je veux rester sur les dalles. Les larges pierres du sol qui me donnent la vie une seconde fois. M'y rouler, m'y rafraîchir, m'y glacer jusqu'à la perte de conscience…

Il revient avec une photo. C'est lui mon père ? Papa… c'est toi ? Tous ces visages inconnus autour de toi, tant de personnes à découvrir...

La voix de mon neveu est douce, cette langue italienne roule, caresse... Il me donne la clé ; il referme ma main sur elle. Ses yeux brillent à lui aussi. Il me relève, il me porte. Me voici, pour la première fois, plus âgée que celui qui me porte, qui me soutient...
 
Je suis … tante ! Je suis… femme ! Je suis…
 
Il veut que je sorte, que je regarde le jardin. C'est bon de mettre ma main dans la sienne. D'être aimée juste pour ce que l'on "est"…

Je suis la fille de son grand-oncle.

C'est trop de bonheur.

Je suis chez moi. Le temps s'arrête. Le soleil...

 

Partager cet article
Repost0

commentaires

C
Des mots poignants, touchants sincères qui témoignent d'une quête éperdue d'identité, de reconnaissance, une lettre rêvée, espérée, fantasmée, une lettre libératrice, qui apporterait délivrance et pardon, un ton juste émouvant où mort et naissance intimement liées se côtoient, se croisent, se superposent, se rejoignent pour que la vie s'épanouisse enfin. J'ai beaucoup aimé ce texte intimiste et délicat Amicalement chrystelyne
Répondre

PrÉSentation

  • : le blog brise
  • : Poésie, textes, vidéos piano, chats
  • Contact

Un bout de moi

PHASME






Mots vides
sans style
de mon stylo
miasmes
de mes poèmes
sans chair
sans ossature
je me sens phasme
brindille
fétu
tige droite
sans âme
une écharde
 un trait
 un tiret
sur ma vie
ce que je suis
ligne
longue
sans poil
sans plume
sans feuille
 un brin
sans racine
sans ventre
une fente
une ébauche
une rayure
petite griffure
faite à la plume
une strie
figée
bâton
bout
de
bois
vide
bout
de
vie

Mes préférés...

Poème


"Je suis"


Je suis

la plume

qui gratte

la page

et qui

la griffe


Je suis

la griffe

qui s'accroche

à l'herbe

du gouffre


Je suis

le gouffre

qui grandit

chauqe jour

au bout

du chemin


Je suis

ce chemin

qui ne mène

nulle part


J'écris...


publié dans "écriture"


Mon petit dernier préféré :
La pesanteur et la grâce

Lumière du Sud

 

 





 


La calèche

Envol

Le vieux guide

Le pays du vent

Communion

L'odeur du temps

L'oiseau de l'aube

La toile

Printemps


Chats (cliquez sur le chaton) 

 








Chanson et
récit autobiographique :
(cliquez sur le phonographe)
 
"Domino",

 

 






 
 

 

Articles RÉCents